Cette semaine, Paris, l’une des capitales de la mode, accueille les défilés Haute-Couture de la saison printemps-été. A cette occasion, Mathilde Dewilde, « directrice de communication, auteur, blogueuse sur Mathilde’s Cuisine, PR addict, conteuse d’histoires culinaires, chocoholic… mais surtout passionnée », comme elle se décrit, nous explique les parallèles entre haute-cuisine et haute-couture. Entretien avec une véritable foodista qui croque chaque expérience de vie à pleines dents…
Qui est Mathilde ?
Mathilde Dewilde : Mathilde est une grande passionnée qui a plongé dans l’univers de la gastronomie et de la cuisine il y a quelques années, en 2008, quand elle a lancé son blog, Mathilde’s Cuisine. Ce blog est une plateforme d’expression sur le monde culinaire de manière générale. Je ne parle pas précisément de cuisine, car je trouve que le mot est très réducteur. Je préfère parler de monde culinaire. Le blog parle des nouveaux restaurants, des nouvelles tendances. J’essaie d’avoir une approche un peu différente des blogs classiques centrés autour des recettes. J’essaie toujours de raconter une histoire derrière un restaurant, une recette, ou un nouveau produit.
Quelle est votre définition d’une « foodista » ?
MD : La « foodista » c’est celle qui s’intéresse à l’univers de la cuisine de manière générale, qui va être à la recherche de la dernière adresse qui vient d’ouvrir, du dernier produit qu’il faut absolument avoir dans ses placards. C’est aussi quelqu’un qui aime beaucoup recevoir chez soi et cuisiner pour ses invités. C’est quelqu’un également à l’affût des dernières émissions culinaires, qui va agrandir sa pile de livres à la maison… C’est une passionnée du monde culinaire.
En quoi la gastronomie et les tendances sont-elles similaires, complémentaires ?
MD : Il y a un beau parallèle à faire. Ce qui est important pour la foodista, c’est de travailler et d’utiliser les produits de saison. La mode a ses saisons ; les produits également. On ne va pas manger des tomates en hiver et des poireaux en été, mais plutôt le contraire. Il faut être capable d’identifier quel est le produit ou la tendance du moment. On a vu par exemple la folie des macarons et la folie des cupcakes, le kimchi (ndlr. mets traditionnel coréen composé de piments et de légumes fermentés, souvent à base de chou chinois) qui a fait son entrée sur les étals des marchés l’année dernière, le fameux kale (ndlr. chou sauvage) qui prend également de l’ampleur… Ce côté tendances et mode on le retrouve dans les produits mais chez la foodista elle-même car c’est quelqu’un qui aime prendre soin de soi, et qui prend du plaisir à bien recevoir !
La gastronomie est-elle donc un laboratoire de tendances, un reflet de la société ?
MD : Complètement ! Je pense qu’on le voit de plus en plus avec les chefs qui se mettent en avant, dans les nouvelles campagnes de communication. Le BHV Marais par exemple a mis en avant des chefs pour Noël. Cette folie autour du fooding met en lumière la jeune génération. On le voit également avec des campagnes de communication. UNIQLO, par exemple, a travaillé sur les tendances autour des couleurs et de ses représentations en cuisine…
Il y a vraiment un parallèle entre le monde de la cuisine, qui s’est démocratisé avec toute cette médiatisation, au travers d’émissions culinaires comme « Top Chef » ou « Le Meilleur Pâtissier ». Cet engouement autour de la cuisine n’est plus réservé à des experts, à des chefs. Tout le monde peut faire de la cuisine. Elle n’est plus une cuisine de grand-mère mais une cuisine où chacun peut s’exprimer avec récréation.
Les créateurs et designers ont tous leurs pièces ou collections emblématiques. Quel est votre plat signature ?
MD : Je suis une chocoholic ! (Rires) Comme toute mode, je suis quelqu’un qui ne répète pas les choses et j’ai beaucoup de mal à faire plusieurs fois le même plat. Je vais toujours aller dans la créativité, dans l’innovation et aller cuisiner quelque chose de différent à chaque fois. C’est vrai, ceci dit, que j’ai toujours un retour vers le monde du chocolat, en particulier les sphères en chocolat que j’aime beaucoup réaliser ! Je les avais faites lorsque j’ai participé à l’émission « Un Dîner Presque Parfait » et plus récemment pour un dîner de Noël. Je trouve ce travail du chocolat particulièrement intéressant !
Avant de réaliser une nouvelle œuvre culinaire, passez-vous par un processus créatif comme le font les créateurs et designers ?
MD : Complètement ! J’ai réalisé un dîner dernièrement pour une dizaine de personnes et je me suis surprise à sortir mon cahier, dessiner mon dessert, et réfléchir aux différentes recettes et à la manière dont elles pouvaient prendre forme ! Il y a non seulement un processus créatif dans la cuisine, mais également dans la réception. Ce que j’aime beaucoup, c’est penser à la manière dont un plat va s’exprimer dans une assiette, quelle assiette je vais choisir pour mettre sur ma table, à quoi va ressembler ma table, quel type de nappe et de couverts je vais choisir, la couleur ou les motifs des serviettes, quelles fleurs vont aller avec l’ambiance de la table… C’est vraiment tout un ensemble qui donne au monde culinaire son expression. Du véritable « art culinaire » !
Justement, comment pensez-vous l’art de la table ? Est-ce le contenu de l’assiette qui va définir l’ambiance et la mise en scène, ou au contraire, la décoration qui détermine les plats dégustés par les invités ?
MD : C’est une combinaison des deux. Je vais plutôt partir du plat et réfléchir à sa présentation dans l’assiette, puis construire ma table. Ce qui est très intéressant, c’est justement d’être en permanence inspirée et en permanence dans une ébullition d’idées !
En quoi l’art culinaire est-il une forme de design ?
MD : Je pense qu’il l’est surtout dans la présentation des plats. Aujourd’hui, on ne sert plus la purée à la louche mais avec un emporte-pièce pour former un rond sur l’assiette. Au restaurant, le dressage d’une assiette est devenu aussi important que le plat. Pour moi, la cuisine se goûte aussi visuellement. Le premier rapport que l’on va avoir avec le plat est visuel, il doit donc être intéressant à regarder pour qu’il mette l’eau à la bouche.
Visuels : © Mathilde Dewilde – Mathilde’s Cuisine ; DR.