Rémi Fourrier: « Les consommateurs ont deux exigences pour la viande: la tendreté et le goût. »

Saviez-vous que ce sont les Anglais qui ont fait découvrir la viande saignante aux français au XVIIIe siècle? Persillée à souhait, goûteuse et tendre, la viande bovine anglaise fait l’unanimité auprès des gourmands et gourmets. Rencontre avec Rémi Fourrier, responsable de l’exportation en France pour EBLEX, office de promotion des viandes ovine et bovine d’Angleterre, pour parler qualité de la viande, exigences des consommateurs et origine du surnom « Rosbifs » donné à nos voisins…

Vous faites la promotion du bœuf originaire de Grande-Bretagne. En quoi cette viande est-elle meilleure qu’une autre?

Rémi Fourrier: Nous avons un produit qui affiche tous les canons de qualité. En général, la promotion de la viande bovine est faite par la race, le terroir et la région de production. Nous nous démarquons en faisant la promotion de la qualité de la carcasse: nous partons du point de vue du professionnel et du consommateur plutôt que de celui du producteur.

Pourquoi?

RF: On considère que la meilleure viande vient de la meilleure carcasse. Mais pour faire la meilleure carcasse, quels sont les principaux paramètres? La race, c’est évident, mais aussi l’environnement, le bien-être animal, le stress au moment de l’abattage, le PH de la viande, la maturation, les conditions de température… De nombreux paramètres interviennent dans la qualité de la carcasse, paramètres qui seront ensuite transmis à la viande. Nos viandes garantissent donc que les principaux paramètres d’évaluation de la qualité du consommateur sont respectés.

rosbifs ! L’histoire des relations franco-anglaise au travers de la viande de boeuf, de Bénédict Beaugé et préfacé par le chef étoilé Michel Troisgros

Quelles sont les exigences des consommateurs pour leur viande?

RF: Lorsqu’on demande au consommateur ce qu’il attend d’une viande bovine, il souhaite en premier qu’elle soit tendre. Dans notre démarche, nous incluons donc tous les outils et les atouts pour garantir cette tendreté. Déjà, nous ne produisons que des animaux jeunes. Tous les mâles sont castrés et nous travaillons exclusivement avec des bœufs et des génisses. Ensuite, nous faisons en sorte que ces animaux soient finis le plus tôt possible, pour justement avoir la viande la plus tendre possible. Cette viande bénéficie d’une finition, c’est à dire d’un engraissement qui lui permette une maturation. Avec la maturation, on améliore encore la tendreté du produit.

La deuxième exigence du consommateur, c’est le goût. Le goût vient essentiellement de l’alimentation. En Grande-Bretagne, l’alimentation de base c’est l’herbe. Il pleut, il n’y a pas de soleil, pas de terrains plats pour faire des céréales mais de l’herbe. Qui dit herbe dit élevage, qui dit élevage dit ruminants en priorité, donc des bovins. L’herbe c’est aujourd’hui ce qui permet le meilleur engraissement de l’animal. D’ailleurs ça peut poser problème: on peut avoir des animaux qui sont trop gras et trop bien finis car il est difficile de contrôler l’herbe que l’animal broute. C’est un de nos soucis: faire un petit peu trop de gras, même si on en a besoin, la saveur étant véhiculée par le gras. Tout le travail de l’éleveur est de finir l’animal correctement à l’herbe, pour pouvoir garantir simultanément la tendreté et le goût.

 

Vous dites que vous partez du consommateur pour remonter à la race. Avez-vous travaillé en amont avec des chefs et des consommateurs pour définir les lignes de la production?

RF: Le retour est très simple en Grande-Bretagne. Le consommateur est roi. Le consommateur dit « Je veux ça » et nous le faisons. C’est vrai que la difficulté que nous avons c’est de faire en sorte que cette viande qui plaît au consommateur britannique, plaise aussi au consommateur français. En France, la tendreté n’est pas forcément le facteur le plus important pour le consommateur, le goût vient avant la tendreté. Le goût est essentiel et il est véhiculé par le gras et par l’âge de l’animal. Plus l’animal est âgé, plus il aura du goût. Mais c’est un souci en terme d’économie de production: plus l’animal est âgé, plus cela prend du temps dans la chaîne de production.

De quelle origine sont les races que vous utilisez? Plutôt écossaises, ou anglaises?

RF: La première race à viande au Royaume-Uni, c’est la Limousine! La deuxième c’est l’Angus, la troisième c’est la Charolaise! On utilise beaucoup de races, on les fait se croiser entre elles. On fait aussi intervenir le troupeau laitier. C’est aussi très important. Si vous voulez qu’un veau pousse rapidement, il faut qu’il ait du lait. Si on n’a pas un pis qui est issu d’une vache laitière, on aura des difficultés à faire grandir les animaux. Et il faut toujours essayer d’utiliser les caractéristiques de chacune des races pour pouvoir faire la meilleure carcasse possible.

Les Français surnomment les Anglais les « Rosbifs » depuis des années. Connaissez-vous l’origine de ce surnom?

RF: J’ai beaucoup joué au rugby, et dès qu’on jouait contre les Anglais, on disait qu’ils avaient les cuisses mauves ! Car quand il fait très froid, les rouquins ont les cuisses mauves! On pourrait dire que ça ressemble à un rosbif! Ca m’a toujours amusé ! En réalité, nous appelons les Anglais « Rosbifs » car cela vient de « Roast Beef », le plat traditionnel du dimanche. Et contrairement à ce qu’on pense, les Anglais ont été les premiers à rôtir et à cuisiner la viande rapidement…

Visuels: (c) Louise Barillec et Aurore Lucas; Textuel.

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