L’éducation des enfants au goût

87% des enfants de 8 à 12 ans ignorent ce qu’est une betterave ; 25% d’entre eux ne savent pas que les frites proviennent de pommes de terre ; 10% des enfants ajoutent systématiquement du ketchup dans leurs plats. Cette enquête, dirigée par l’Association Santé Environnement de France et réalisée sur des enfants de la région PACA, met en lumière un phénomène actuel : le manque d’éducation des enfants au goût. Ironiquement, cette étude vient de pair avec l’explosion d’émissions de cuisine, la publication de nouveaux magazines culinaires et l’essor des ateliers et cours de cuisine en compagnie de chefs de renom. L’éducation des papilles et l’apprentissage du goût des enfants seraient-ils en train de se perdre ?

Crêpes au sucre, spaghettis à la bolognaise, frites ou jambon blanc … Les goûts des enfants sont simples. En effet, jusqu’à l’âge de 5 ans, les notions de sucré, de salé, de piquant et d’acide sont difficiles à manier pour les jeunes papilles. A cet âge, les enfants préfèrent nettement le goût sucré et ne sont pas de grands aventuriers culinaires : entre 2 et 10 ans, 77 % refusent d’ailleurs de goûter spontanément des aliments qu’ils ne connaissent pas déjà.

(c) Yada Photographies

C’est alors que les adultes gastronomes interviennent : ce sont eux qui doivent transmettre aux petits le plaisir de déguster un plat savoureux, de choisir des produits de qualité et de saison, et le bonheur d’un moment de partage autour d’un repas. En effet, le goût s’éduque, s’apprend. Les enfants doivent être encadrés dans leur découverte gustative et apprendre à décoder les messages qu’expriment les aliments. Ils doivent également veiller à déguster les aliments avec leurs cinq sens : sentir un arôme, écouter une cuisson, toucher un aliment, regarder un dressage, reconnaître une saveur. En effet, à l’image des autres sens, le goût évolue au cours des premières années de l’enfant. Dès son plus jeune âge, l’enfant doit donc recevoir une alimentation très variée et alterner entre sensations gustatives (salé, sucré, amer, acide), sensations thermiques, sensations olfactives, sensations auditives (aliments craquants ou non) et sensations tactiles (volume, consistance…).

Initier les enfants à la gastronomie, les sensibiliser aux saveurs et varier les repas, c’est aussi leur faire comprendre très tôt l’importance d’une alimentation variée et équilibrée: manger de tout leur apportera tout ce qu’il faut pour grandir ; manger lentement en mâchant bien leur permettra de libérer les saveurs des aliments et de les déguster.

L’esthétique des plats et des aliments est un autre facteur important dans l’éducation alimentaire des enfants. Les chefs accordent une grande importance au dressage de leurs plats ; les enfants aussi doivent être flattés à l’œil par le contenu de leur assiette. La réticence des enfants vis-à-vis de certains aliments (comme les lentilles, les épinards, les champignons …) vient de leur aspect, loin d’être très esthétique pour certains. Eduquer au goût signifie également mettre en scène l’assiette, joliment présenter un repas, expliquer le contenu du menu à venir et faire apprécier à un enfant l’esthétique d’un beau plat ; ces éléments fondateurs seront d’ailleurs les bases d’une culture culinaire conservée à vie.

(c) Yada Photographies

A partir de l’âge de 18 mois, l’enfant peut partager les aliments et la table des adultes et associer bonne gastronomie au souvenir impérissable d’un moment en famille. A partir de l’âge de sept ans, le goût des enfants évolue. Les enfants demandent de goûter aux produits sans les connaître, sont plus souples par rapport aux aliments et moins renfrognés quand il s’agit de regoûter un plat qu’ils n’aimaient pas auparavant. A sept ans, les enfants ont aussi le pouvoir d’analyser les réactions qui interviennent au niveau de leurs papilles gustatives, les sensations qu’ils ont en bouche. Ils peuvent alors entamer une véritable démarche de dégustation. Sept ans, c’est également l’âge où les enfants imitent les comportements des adultes à table – tenir correctement les couverts, renifler l’arôme d’une boisson, participer à la conversation. Cependant, l’éducation au goût ne passe pas seulement par des plats mijotés à la maison. Emmener son enfant dans un restaurant gastronomique contribue à sa culture culinaire. En effet, en plus d’apprécier les plats, il pourra découvrir avec intérêt le décor du restaurant, prendre en compte la mise en place des tables, apprécier la forme des assiettes et les pliages des serviettes.

Un chose est certaine lorsqu’il s’agit d’éduquer les enfants au goût : la culture culinaire passe avant tout par la pratique. Il faut sentir, toucher, déguster, comprendre, apprécier les aliments pour apprendre à les aimer. La tendance à la création culinaire touche aujourd’hui tous les médias, tous les milieux et tous les âges. Les cours de cuisine et ateliers sont même spécialement conçus et adressés uniquement aux enfants, qu’ils soient simples cours de pâtisserie où véritables ateliers en compagnie d’un grand chef. Dans ces ateliers, c’est au tour des chefs d’enfiler toque et tablier pour devenir de véritables éducateurs du goût.

(c) La Gazette du Val d'Oise

Cyril Lignac par exemple, donne des cours de cuisine à des enfants de 6 à 11 ans dans son école Cuisine Attitude. Dans une ambiance ludique et pédagogique, les chefs en herbe apprennent à réaliser, comme des grands, des plats qu’ils aiment. Pour le chef Cyril Lignac, l’éducation du goût doit se faire en s’amusant.

A l’école de Cuisine d’Alain Ducasse, l’objectif des cours de cuisine pour les jeunes gourmands côtoie celui de Cyril Lignac : apprendre et se sensibiliser au goût tout en s’amusant. Les petits cuisiniers ont le choix pour partir à la découverte de la gastronomie : « Le p’ti menu » (les enfants réalisent leur propre menu tous seuls, de l’entrée au dessert), « L’heure du goûter ! » (les enfants confectionnent des goûters sains et gourmands qu’ils peuvent reproduire eux-mêmes) et «Jour de fête ! » (les plats de Noël, de l’épiphanie, de la Chandeleur ou encore Pâques revisités par et pour les enfants).

Puisque la haute gastronomie n’est pas uniquement réservée aux grands, l’Ecole Ritz-Escoffier  proposait – jusqu’à sa fermeture pour rénovation – des ateliers de cuisine et d’art culinaire pour les enfants : les « Ritz Kids », pour les 6-11 ans et les « Toques Junior », pour les 12-17 ans. Chaque mois, un chef prestigieux et ses collaborateurs préparait un thème différent et créait des recettes pour l’occasion. Les enfants apprennent ainsi les gestes fondamentaux, tout en s’amusant, et dégustent leurs réalisations.

(c) Yada Photographies

A travers ces cours et ces ateliers, les chefs créent une véritable proximité avec leurs petits élèves et leur font (re)découvrir le plaisir de goûter et de cuisiner. Les recettes sont adaptées aux âges et à la maîtrise de chacun. Véritable moments de partage gustatif et de transmission de savoir culinaire, ces cours et ateliers prouvent que la bonne humeur et la convivialité associées à la cuisine, la mise en scène et la présentation des produits, ainsi que l’encadrement et la transmission de la passion permettent d’éduquer les enfants au goût.

La découverte d’aliments nouveaux et les expériences sensorielles liées à la gastronomie sont autant d’étapes qui éduquent les papilles des plus petits. Dès le plus jeune âge, chaque enfant devrait connaître le plaisir du goût et le plaisir de goûter. En effet, c’est au travers de ses propres expériences que l’enfant appréciera toute la palette des sensations offertes par les aliments. Dans cette éducation au goût, l’enfant ne se contente pas de manger pour uniquement se nourrir; il prête attention aux aliments qui se trouvent dans son assiette, aux couleurs, aux odeurs, à la méthode de cuisson. L’enfant se laisse également guider par ses émotions, par ses propres goûts qui deviennent de plus en plus avertis, par son jugement culinaire. C’est cet apprentissage du goût qui posera les fondations de chacun en matière de culture culinaire …

Visuels : © DR

Dans les coulisses de la Maison du Chocolat

Pâques sans chocolat est comme la « Pizza sans olive » du chanteur Thomas Dutronc: impensable. A l’occasion de cette fête que la plupart des Français fêtent à coups de kilos de chocolat, nous nous sommes rendus dans un atelier qui fabrique depuis plus de 35 ans ses bonbons de manière artisanale. Reportage dans les coulisses de la Maison du Chocolat

Il est 9 heures. Les ateliers de la Maison du Chocolat, situés à Nanterre, s’apprêtent à ouvrir leurs portes à une poignée de blogueurs culinaires venus expressément pour l’occasion. C’est la première fois que la Maison du Chocolat ouvre ses ateliers au grand public, chaque personne présente se sent donc privilégiée. Telle une classe de découverte, les cahiers de notes et les stylos sont de sortie, les Smartphones et tablettes sont connectés au web et aux appareils photo, et les oreilles sont avides de savoir.

Après un petit déjeuner tout chocolaté offert par la maison – chocolat chaud traditionnel délicieusement épais et gâteau moelleux au chocolat noir ultra-gourmand – direction le rez-de-chaussée. Souci de l’hygiène oblige, qui se doit d’être irréprochable à tout moment de la journée, les mains sont savonnées et nettoyées à grande eau puis séchées dans des sèche-mains antibactériens. Chacun enfile une blouse blanche, des chaussons en plastique par-dessus les chaussures et place une charlotte sur les cheveux. Les ateliers de la Maison du Chocolat sont des lieux stériles ; rien de doit donc dépasser.

Le chef de la Maison du Chocolat et Meilleur Ouvrier de France Chocolatier 2007 Nicolas Cloiseau est notre guide le temps de la visite. L’odeur du chocolat prend au nez à l’instant même où nous franchissons les portes de l’atelier. Suave, gourmand, exotique, il séduit instantanément.
35 sortes de chocolat sont fabriquées à l’atelier, tous fabriqués à la main, réparties en différents bonbons : pralinés, ganaches natures, ganaches parfumées, gourmandises. Chaque année, une douzaine de chocolats éphémères sont également créés, destinés aux fêtes familiales, aux coffrets de saison et aux pièces de prestige. Les 35 sortes de chocolat se répartissent en 1/3 de chocolat au lait, pour 2/3 de chocolat noir. Ainsi, près de 200 tonnes de chocolat sort des ateliers chaque année.

En cette journée découverte, nous allons suivre toutes les étapes de la fabrication d’une ganache, le chocolat signature de la maison. Le chocolat brut est à la base de la ganache. De la marque Valrhona, il est sous forme de pastilles, plus faciles à travailler.

Autre produit de base de la ganache, le lait. Il doit être bouilli avant d’être mélangé au chocolat.
Le chocolat et le lait sont ensuite mélangés dans une machine qui incorpore de l’air à l’émulsion, la rendant plus légère et plus onctueuse.

La ganache est ensuite versée sur de longues tables en marbre dans une salle de repos à la température de 10°C.

Les chocolatiers étalent ensuite la ganache à l’aide de spatules afin que l’épaisseur soit égale sur toute la longueur. Le geste est précis et rapide, le chocolat durcissant lorsqu’il se refroidit, ou se « cristallise ».

Direction ensuite la salle « des musiciens » quand le point de cristallisation est atteint. Ces « musiciens » chocolatiers découpent la ganache en petits carrés avec une guitare, machine aux fils tendus qui rappellent l’instrument à corde.

Ces bonbons découpés s’en vont ensuite se faire beaux. En effet, selon sa saveur, chaque bonbon est marqué d’un décor : un fruit sec, un morceau de sucre coloré, un dessin dans le chocolat.

Toutes sortes d’outils sont utilisés pour créer des décors tous les plus originaux que les autres.

Tous les bonbons sont travaillés un à un à la main et il faut entre dix et quinze étapes à chaque bonbon avant d’être commercialisé. Soucieuse quant à la qualité de chaque bonbon qui sort de ses ateliers, la Maison du Chocolat contrôle chaque produit. Un travail pointilleux qui reflète le devoir de perfection que s’est donnée la Maison.

(c) RDV Communication

Passion, savoir-faire et amour du produit font partie de chacun des bonbons qui sortent de la Maison du Chocolat. Depuis 35 ans, ils régalent le monde entier, de New York à Tokyo, en passant par Londres. Les gourmands ne pourront que fondre de plaisir…

Visuels : © RDV Communication