Romain Chassang: « Le whisky est véritablement une expérience »

Avec le changement d’heure vient le changement de température, puis le changement d’habitudes. Les bières, limonades et autres boissons rafraîchissantes ont cédé la place aux chocolats chauds, thés et vins chauds. Cependant, il est une boisson qui se déguste quelle que soit la saison: le whisky. Depuis 1997, Diageo, entreprise née de la fusion de deux entreprises Britanniques Grand Metropolitan et Guinness PLC, œuvre pour la production de whiskys de qualité, qu’ils soient tourbés, boisés ou iodés, single malt ou blend. Pour s’y retrouver parmi les nombreuses variétés, Romain Chassang, directeur de l’agence d’évènementiel Drinking Better, nous donne quelques clés pour mieux comprendre le whisky…

Quels sont les whiskys emblématiques de Diageo ?

Romain Chassang: Parmi les produits les plus connus, il y a Glenmorangie Original 10 ans d’âge, le plus classique, et Glenmorangie Nectar D’or, symbole de la double maturation. Pourquoi est-il appelé Nectar d’Or? Parce qu’il est maturé dans deux types de fûts : pendant les dix premières années, dans des fûts de bourbon, et les deux dernières années avec des foudres de sauternes. Cela apporte des notes bien particulières. Ensuite, il existe des gammes avec des coûts francs plus conséquents : les 18 ou 25 ans pour lesquels on utilise des fûts de Xérès Oloroso. Avec Signet, on fait des assemblages entre notre whisky le plus vieux, distillé il y a plus de trente ans, et des whiskys appelés Chocolate Barley, qui, en malt, permettent d’avoir des notes chocolatées ou de café, dans cette même famille aromatique. C’est un whisky que l’on faisait il y a quelques années, au caractère très authentique.

A côté de ça, il y a Ardbeg, avec trois références. Ardeg Ten, Ardbeg Uigeadail, qui est le nom de la source qui alimente la distillerie, et Galileo qui célèbre une expérience: l’envoi sur la lune de particules d’Ardbeg en échantillonnage en octobre 2011. L’idée est de voir comment elles évoluent avec une gravité zéro et d’étudier comment se comporte un vieillissement sur la Lune. Ces particules reviennent d’ici un an pour célébrer Galilée.

Quels sont les whiskys que les Britanniques apprécient le plus ? 

RC: C’est très intéressant. En Ecosse, Glenmorangie est le plus reconnu et le plus apprécié. Depuis 25 ans, c’est une marque de qualité. C’est quelque chose de relativement équilibré, très spécifique mais agréable: des fleurs, des fruits, des épices faciles à ressentir. Les produits trop complexes vont décourager les palais amateurs.

Et les whiskys que préfèrent les Français?

RC: La France est la première consommatrice de single malt, c’est à dire de whiskys à base de malt provenant d’une seule distillerie. Les Français sont très fervents de produits typiques et de produits de niche. Normalement, ce sont plus des blends qui se consomment dans la masse. En France, on est le premier marché de single malt, donc on est déjà un peu spécialisés. Si on parle d’Ardbeg, des produits qui viennent des île d’Islay, les Français en raffolent. Même les whiskys japonais ont pris leur savoir-faire en Ecosse, des modèles d’alambic aux méthodes de fabrication. Les Américains, en comparaison, sont plus proches de l’Irlande, dû à ces fameuses histoires d’immigration et à la Grande Famine. Tous les spiritueux ont d’ailleurs souvent des rapports intimes avec l’histoire. Pour le whisky et la Grande-Bretagne, on peut remonter jusqu’à une époque Celtique. C’est vrai que les spiritueux ont souvent été vus comme des remèdes. C’était un bon moyen de les vendre, en négoce, expliquant qu’ils avaient des vertus médicinales. Mais pour le whisky, l’église a toujours gardé le monopole. En France, ce côté médicinal a souvent été mis en valeur pour pouvoir vendre les spiritueux… Et ils ont beaucoup enrichi les religieux et les ordres!

Existe-il un art de déguster le whisky à la Britannique ?

RC: Pas forcément. Il n’y a pas un rituel comme on peut retrouver au Japon avec la cérémonie du thé. En fonction des produits plus ou moins complexes, on va les diluer avec de l’eau. Mais ça c’est en fonction de chacun, de son propre palais, de sa propre expérience gustative. Qui plus est, on n’a pas le même palais à 20 ans qu’à 30 ans. On le voit avec les enfants qui n’aiment pas un ingrédient et vont l’aimer en grandissant. C’est exactement la même chose avec le whisky. Ce n’est pas forcément l’apprécier ou non, c’est plutôt le ressentir.

Quels conseils de dégustation pouvez-vous nous donner ?

RC: Je conseille toujours de boire le whisky à température ambiante, c’est très important. Une température trop basse à tendance à inhiber certaines notes de dégustation dans le palais. Au nez, cela ne va pas changer grand chose mais ça inhibe aussi un petit peu. Aussi, quand on va déguster un produit et qu’on a du mal à en cerner les notes, il faut tester un produit de la même famille, de la même marque ou un produit concurrent qui va permettre de se faire une propre opinion et de découvrir des notes qui n’étaient pas franches. En comparant deux produits, il est beaucoup plus facile de mettre en avant des notes de dégustation. L’avantage du whisky, c’est qu’en fonction de sa provenance, il va avoir des caractéristiques plus ou moins marquées. Si l’on prend le cas d’Ardbeg, on a un caractère très iodé qui se marie avec des poissons, le même côté mer que l’on retrouve dans des whiskys des Islay. Les whiskys des Highlands sont plutôt de très bons whiskys d’apéritif. Et puis en prenant de l’âge, on sera plutôt dans des arts de vivre qui incluent les cigares, et on retrouvera des tons chocolatés dans les whiskys qui rappellent ces cigares. Chacun adapte le whisky au moment qui lui correspond le plus. Le whisky est véritablement une expérience.

Visuels: (c) Louise Barillec et Aurore Lucas

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