Thierry Schwartz : « J’ai envie de revaloriser le patrimoine culinaire alsacien. »

Alsacien de cœur et d’origine, Thierry Schwartz est avant tout un chef passionné par son terroir. Sa région est sa source d’inspiration et Thierry Schwartz travaille chaque jour à valoriser les spécialités et producteurs locaux. Il nous parle des spécialités d’Alsace, de sa cuisine inventive et du besoin de mettre les traditions culinaires régionales en valeur.

Quelles sont les spécialités culinaires et vinicoles d’Alsace ?

Thierry Schwartz : La choucroute, le baeckeofe, le kouglof, le bretzel, qui sont des incontournables. On a aussi le jarret de porc, le knack, les spécialités charcutières comme le boudin noir. Du côté des spécialités vinicoles, on retrouve les différents cépages des vins d’Alsace : le Gewurztraminer, le Sylvaner, le Riesling, le Pinot Noir, qui est souvent méconnu, le crémant d’Alsace, qui monte en puissance. Il y a également les eaux de vie, le « Biersky », de la distillerie Uberach, le whisky alsacien. Il y a également la bière, qui est une spécialité de la brasserie Meteor, la dernière brasserie familiale indépendante alsacienne.

(c) Thierry Schwartz

Quelles sont, selon vous, les caractéristiques de cette cuisine de l’est ?

TS : Elle est riche, généreuse et gourmande à la fois. Cette cuisine est issue d’un terroir très diversifié, entre la plaine d’Alsace, le Rhin et les pêches du Rhin et les montagnes. Nous sommes donc entre vignes, plaines, terres, montagnes et avons une grande diversité culturelle et territoriale.

Vous êtes alsacien de cœur et d’origine. Quelle spécialité régionale ne vous lassez-vous jamais de déguster ?

TS : Toutes ! Toutes les spécialités. La choucroute, le baeckeofe… On ne s’en lasse jamais ! C’est gourmand et en plus il y a une diversité entre les familles, entre le Haut-Rhin et le Bas-Rhin. Chacun a sa recette, un peu comme toutes les spécialités régionales. Une des recettes très connues et les plus anciennes du foie gras d’oie d’Alsace est le pâté Maréchal des Contades. Le foie gras d’oie d’Alsace est bien présent depuis le XVIème siècle. En 1718, Jean-Pierre Klaus, le cuisinier du Maréchal de Contades, eut l’idée, sur demande, pour la venue d’un prestigieux invité du Maréchal, de faire un pâté de forme cylindrique, bourré de foie gras, que l’on décalottait et que l’on servait à la cuillère. La croûte était à base de saindoux, très sablée. Elle était à l’époque plus salée qu’aujourd’hui et faisait aussi la conservation entre graisse et sel.

(c) Thierry Schwartz

Quels produits de l’est proposez-vous dans votre restaurant, le Bistro des Saveurs ?

TS : On propose tous les produits régionaux et locaux. On travaille de près avec les agriculteurs et les éleveurs locaux, les agriculteurs qui font des céréales ou la choucroute. On propose la carotte, les betteraves, le cabri (on a un éleveur de cabris dans la région), on a un éleveur de bœufs dans le Ried. On propose aussi tout ce qui est cochon, cochon de lait, les bœufs race vosgienne… Tout cela, au travers des agriculteurs, sont des produits que l’on utilise et que l’on propose.

A travers votre cuisine, faites-vous découvrir de nouvelles saveurs aux visiteurs ?

TS : On fait redécouvrir des saveurs oubliées ou méconnues, comme le travail des légumes en toute simplicité, autour de la cuisson, de la qualité du légume et du rehaussage des saveurs. La carotte par exemple, est cuite pendant trois heures avec sa peau. On retrouve de fait un aspect diététique et gustatif, la carotte est fondante et goûteuse. La betterave, aussi, que l’on travaille comme un vin chaud. On prend toutes les variétés de betteraves qui existent et on les fait cuire en robe des champs, avec un sirop de vin chaud et quelques épices de Noël.

(c) Thierry Schwartz

Vous avez inventé le « Bret’wich », mix de bretzel et de sandwich. Est-ce un moyen de remettre au goût du jour les traditions gastronomiques de la région ?

TS : Tout à fait. C’est exactement ça. C’était une envie de revaloriser le patrimoine alsacien. L’idée c’était de revaloriser le bretzel, qui aujourd’hui n’existe quasiment plus qu’en version industrielle. Aujourd’hui, on a relancé la production du bretzel au beurre, artisanal, fait à la main. De plus, nous sommes certifiés Ecocert en bio. On a voulu, à travers cette démarche, pousser le bouchon plus loin en faisant le « Bret’wich ». C’est vendu dans notre boulangerie, un sandwich sur-mesure à composer soi-même.

En quoi est-il important de faire vivre les traditions culinaires d’une région ?

TS : C’est un attachement à toute une vie. C’est le vivant, l’histoire, le terroir et l’avenir.

Visuels : © Thierry Schwartz