Le coup de coeur de la semaine: l’exposition Nourritures Premières

«Vivant» était le thème de l’édition 2013 du salon Maison & Objet. « Vivant » est aussi le point de départ d’une réflexion sur la quête d’un mode de vie plus harmonieux, ancré dans le réel, en opposition au monde de plus en plus dématérialisé et virtuel. Cette réflexion a donnée naissance à une exposition : « Nourritures Premières ». C’est notre coup de cœur de la semaine.

«Des graines germées à la viande en passant par le lait, le miel, le sel, les légumes ou encore le pain, les nourritures ancestrales de l’humanité deviennent les matières premières d’une esthétique qui met l’eau à la bouche. L’aliment inspire la créativité des artistes. Le cru et le cuit nourrissent nos appétits d’authenticité et de matières avec des expressions symboliques qui transcendent la Nature et des émotions qui revigorent le corps et l’esprit. Une liturgie du partage qui célèbre l’énergie vitale et le plaisir des sens.»

C’est ainsi qu’Elisabeth Leriche, à l’origine des «Parcours d’inspirations» du salon Maison & Objet, présente « Nourritures Premières », exposition où les nourritures originelles deviennent les inspirations des créateurs et prennent une forme autre entre leurs mains. Le sel devient abat-jour, le lait se fige en photographie et même le pain se métamorphose en assiettes et couverts.  «Derrière cette démarche de matières premières, il y a une réflexion écologique,» explique Elisabeth Leriche, «Pourquoi pas imaginer que les contenants dans les lesquels nous mangeons, nous puissions les manger, pour avoir moins de déchets ?»

Le pain, à l’entrée de l’exposition, aliment de base dans de nombreuses cultures, s’est mué en protecteur et non plus en nourricier. Les baguettes durcies enfilées sur des câbles métalliques font office de barrière contre l’extérieur, et pourquoi pas contre la « faim du monde ».

Les bols colorés aux pigments alimentaires et les teintures végétales et minérales de l’artiste Victor Hunt font écho à la multiplicité de l’offre de la nature. Non seulement nécessaire à la survie de l’espèce humaine, elle se fait aussi esthétique, et embellit les outils que les hommes usent au quotidien : une assiette, un bol.

Pied de nez à la surconsommation, les légumes non-comestibles de Scholten & Baijings. Appétissants et beaux, ils se cachent derrière une vitre, inaccessibles aux papilles, et se font regarder sans jamais pouvoir se goûter.

La réflexion de Merry est à l’opposé de celle sur l’inaccessibilité pour tous de la nourriture avec ses assiettes croquées « I’m Hungry » (J’ai faim). Ce travail expérimental apporte une touche ironique à la vaisselle, transgresse entièrement le protocole en suggérant qu’il est désormais d’usage de finir son assiette, se lécher les doigts puis croquer dans sa propre porcelaine.

Alors que Merry suggère des traces de dents dans le coin de l’assiette, d’autres transposent les idées surréelles en services dînatoires complets. Désormais le pain, généralement un accompagnement, devient un contenant. Les objets se font désormais utilitaires et reviennent à des valeurs de simplicité.

Lemm & Lemm, eux, ne veulent pas que leurs assiettes subissent le même sort et ont créé «Le Dîner Ambulant». Ici, les designers cherchent les limites de la porcelaine comme matériau ainsi que l’équilibre de l’objet fragile. A l’ère des «Food Box» et autres livraisons à domicile, où la nourriture se fait apporter sans effort au pas de la porte, qu’adviendrait-il si nos assiettes prenaient tout à coup leurs jambes à leur cou ?

Travailleuses essentielles à la survie des espèces et au bon équilibre de l’éco-système : les abeilles. Sans elles, la pollinisation des fleurs serait impossible et la reproduction des végétaux inexistante. Tomas Gabzdil Libertiny a voulu explorer la notion de désir et de matérialisme à travers un vase fait entièrement de cire d’abeilles naturelle, façonnée par les abeilles elles-mêmes, fruit des fleurs en pleine vie qui devient ensuite contenant pour ces mêmes fleurs en fin de vie. Un hommage au cycle de la nature dans sa forme la plus primaire.

Marc Bretillot a souhaité, lui, à travers un design culinaire, faire vivre une expérience autour du miel en créant une cuisine éphémère, où le miel et la cire se mêlent à la cuisine, soit en tant qu’aliment, soit en tant que récipient. Une réflexion sur l’utilisation intégrale de chaque produit pour éviter le gaspillage.

Autre élément de base à la vie, le lait. Figé par une photographie, il devient objet d’expérimentation et d’art dans l’objectif de Jean-Jacques Pallot.

Les bouteilles en porcelaine blanche émaillée de Caroline Gomez font écho à l’industrialisation et la transformation du lait au quotidien, trouvé désormais sous de nombreuses formes fort éloignées de son aspect primaire : en poudre, stérilisé, en conserve, concentré.

Lucile Vanstaevel, elle, étudie les nombreuses transformations naturelles du lait à travers une installation en coton : « la peau du lait se fripe, se boursoufle, les pliages s’empilent, les tissus se gaufrent. Le lait mousse, monte, puis déborde, les textiles se meuvent, les surfaces glissent, se prennent en volume, sont mis à plat. Caillé et surimpressions, tourné et perles, entier et lin. Polyester, nylon, toile, laine, pour des rendus de cru, entier, ribot, battu, petit-lait… »

Plus violente, l’installation de Tamara Kostianovsky. Les vêtements sont torturés pour recréer la chair, le cartilage et la graisse de carcasses de bétail grandeur nature. Une réflexion sur les besoins voraces du corps à consommer de la viande, néfastes à l’environnement.

«Le sel gemme» de l’artiste polonais Piotr Oleszkowicz apporte une touche d’élégance, en remettant en contexte le sel, première nécessité quasiment inépuisable, jadis nommé l’ «or blanc».

«Je pense que nous sommes dans une société de surconsommation et j’avais envie de montrer que l’on peut revenir à des choses simples, et peut-être consommer moins mais mieux,» conclut Elisabeth Riche, «Plus on va aller vers le développement du virtuel, plus on aura besoin de se raccrocher aux matières et à la nature».

Ainsi, à travers l’exposition « Nourritures Premières », où l’art de vivre aspire au mieux-vivre, la création se fait désormais « bio-inspirée », les matériaux sont organiques et épurés, la nature reprend le dessus dans l’univers de la maison qui devient à son tour un véritable organisme vivant et mouvant. Une belle réflexion sur nos problématiques contemporaines…

© RDV Communication

Maison et Objet, un salon bien « Vivant »

Charme à la française, luxe à l’italienne, épuré à la scandinave, opulence à l’orientale… Tous les styles, les tendances et les ambiances se retrouvent au Salon professionnel Maison & Objet. Reportage au cœur de la création « Made in Home ».

Rendez-vous incontournable des professionnels de la mode de la maison, de la décoration intérieure et de l’art de vivre, le salon Maison & Objet à Paris Nord Villepinte rassemble à chaque édition plus de 3100 exposants, fabricants de meubles, architectes, créateurs et artisans de 137 pays différents et attire près de 87 000 visiteurs. Lieu de présentation des dernières nouveautés et tendances, le salon Maison & Objet est également un lieu de création et d’innovation en matière de design et de décoration haut de gamme.

Le salon explore, dans ses collections printemps-été et automne-hiver, tous les secteurs de la maison dont le luxe, le design, l’architecture d’intérieur et les accessoires de maison, et présente les dernières tendances en matière d’ameublement, de décoration intérieure, d’arts plastiques, d’accessoires de mode et de maison, d’arts de la table, de linge de maison et de solutions d’aménagement.

A la recherche d’un mode de vie plus harmonieux, ancré dans le réel, en opposition avec notre monde de plus en plus dématérialisé et virtuel, le salon a cette année pour thème, le «Vivant». L’art de vivre aspire au mieux-vivre, la création se fait désormais « bio-inspirée », les matériaux sont organiques et épurés, la nature reprend le dessus dans l’univers de la maison qui devient à son tour un véritable organisme vivant et mouvant.

Nous débutons notre visite de cette édition 2013 du salon Maison & Objet avec le « Parcours d’Inspirations », trois expositions qui permettent aux visiteurs de (re)découvrir le thème du vivant et de la nature.

La première, « Nourritures Premières », est consacrée aux aliments primaires : pain, lait, miel, légumes et viande. Ces nourritures originelles deviennent alors l’inspiration des créateurs et prennent une forme autre entre leurs mains. Ainsi, le pain se métamorphose en assiettes et couverts, le sel devient abat-jour, le lait se fige en photographie.

Deuxième exposition, « Renaiscience », ode à la nature passée au microscope, sorte de laboratoire de l’étrange, entre métamorphose et renaissance. Tubes à essais transformés en photophores, trombones devenus chandeliers, chaises inspirées d’assemblages moléculaires, les installations éphémères de « Renaiscience » secouent la routine et donnent aux objets des formes et fonctions belles et bizarres, explorant les confins de la création.

« Pionnier » est la dernière exposition et reconsidère les modes de vie et les comportements à travers des objets plus durables. « Pionnier » incarne une énergie physique, où chacun ressent le besoin de se connecter au vivant, où les objets se recyclent et se réparent, où les frontières entre neuf et ancien se floutent, où la proximité se substitue à la grande échelle et où la simplicité de l’échange règne en maître.

C’est en emportant la réflexion sur le « Vivant » que nous nous enfonçons dans le dédale d’allées du Parc des Expositions de Paris Nord Villepinte, direction l’espace Ethnic Chic, tour du monde de l’artisanat. Travail des matières nobles, comme le bois, le cuir, les peaux et les fourrures, accessoires faits à la main, tables et chaises en fer recyclé de bidons, toute la « World Déco » est rassemblée en un espace. Le savoir-faire mondial s’expose fièrement, qu’il soit concrétisé par des portes décorées de Chine, des meubles importés d’Inde, des casques de Samouraï, des bijoux du Brésil faits en « Golden Grass », des tissages et accessoires Singapouriens d’Artisans, des vêtements du Népal ou par des mètres carrés de tapis turcs recyclés.

Ethnic Chic c’est également un voyage sensoriel et temporel. Sensoriel, car chacun des cinq sens est sollicité pour découvrir et véritablement apprécier chacune des pièces présentes au salon : le travail du cuivre et de diffusion de la lumière dans les créations d’Hollander, l’utilisation novatrice et urbaine des appliques en acier de Marie Baratte, les services à thé dessinés et faits à la main.

Temporel, car l’Ethnic Chic laisse une place de choix aux intérieurs d’inspiration coloniale, aux sacs à mains, accessoires et bijoux estampillés « L’Indochineur », à l’art de Via Pondichery, aux fleurs en tissu d’Adornment ou aux créations géantes de Aangenaam XXL.

Ce sont les textiles en tous genres qui prennent le relai sur l’Ethnic Chic. Les plus grandes maisons sont d’ailleurs réunies pour l’occasion et exposent avec passion leurs produits emblématiques : l’opulence animalière de Roberto Cavalli, les rayures signature de Sonia Rykiel, l’art du tissage de Kenzo, le savoir-faire de Quagliotti.

Ici se trouvent tous les représentants du « Bed, Bath and Fashion », des peignoirs en soie au linge de maison en coton égyptien, des serviettes colorées pour les enfants aux coussins décoratifs pour l’intérieur, du tweed classique anglais au luxe à l’italienne.

Direction ensuite les arts de la table où les Italiens Guzzi, Alessi et Bugatti côtoient les classiques de Laguiole, Revol ou Mauviel.

Les ateliers de découverte et de dégustation se succèdent : les arômes naturels, huiles, sirops et confitures de Crazy O prennent vie, la fourchette Handy© anti-roulis fait son show, les lunch-box Bento en convainquent plus d’un et le porte-couteau « Fakir » ne laisse aucun cuisinier insensible. Ici, la création s’exprime librement, les inventions en tous genres se perdent dans l’immensité du choix et tous les objets, qu’ils soient fonctionnels ou décoratifs, deviennent des objets d’art culinaire.

Après une courte pause et une baguette sur le pouce, c’est vers la décoration intérieure que nous mènent nos pas. Le savoir-faire de chaque artisan se traduit dans les luminaires, les accessoires, les meubles et les décorations de table.

Quelques rencontres se font insolites, comme les tables de jeux en cuir de crocodile ou les « Objets de Curiosité », instants de nature capturés et mis sous verre.

 

S’en suivent les accessoires de maison en tous genres, de la nouvelle ligne cosmétique de Durance à l’huile d’olive bio, aux décorations florales de la collection Samion, sans oublier les parfums d’intérieur des plus grandes maisons, telles que Christian Lacroix.

C’est sur un feu d’artifice de luxe et de beauté que se termine la visite de cette édition 2013 de Maison & Objet. Daniel Echter, Kenzo Maison, Ralph Lauren, Armani Home, le Thé Mariage Frères, Rina Menardi, le verre de Murano, le Crystal Baccarat et Haviland-Daum, entre autres, se servent, à perfection, de la décoration intérieure comme prétexte à la création et à l’innovation.

Même si à Maison & Objet chacun apporte sa touche d’innovation, de création et d’originalité, tous semblent avoir usé du fil rouge du salon pour explorer à leur tour cette idée du « Vivant ». La tendance cette année est véritablement une ode à la nature.

Les matières recyclées, les matières « vivantes », comme le bois, la laine et le cuir font un retour prononcé. La tendance est également à l’association du beau et de l’utile et à la revalorisation d’objets anciens, également présente dans la mode du vintage, ces objets devenant des phœnix de l’art de vivre, renaissant continuellement de leurs cendres.

Après l’apocalypse en 2012, serait-ce donc la (re)naissance de l’art de vivre en 2013 ?

Visuels : © RDV Communication