Le coup de cœur de la semaine : le Château Bourillon

Outre sa gastronomie riche de terroir et de saveurs, la région Touraine produit un vin reconnu à l’international : le Vouvray. Mousseux, pétillant ou tranquille, brut, sec, demi-sec, et moelleux, le vin de Vouvray, dont l’Appellation est d’Origine Contrôlée depuis 1936, a su se faire une place de choix au sein du patrimoine vinicole français. Frédéric Bourillon, à la tête du Domaine Bourillon Dorléans, travaille chaque jour à perpétuer la tradition de sa famille. C’est notre coup de coeur de la semaine.

Classé patrimoine mondial par l’UNESCO, Vouvray se situe à quelques kilomètres de Tours. Riche d’un vignoble à la limite entre l’influence océanique et l’influence continentale, cette région, composée de 3000 hectares de coteaux, permet aux vignerons qui y sont établis d’élaborer des cuvées de fines bulles, des vins secs, demi-secs ou même moelleux, lorsque l’été indien accompagne les vendanges. Le Chenin, cépage roi du Val de Loire, s’exprime dans la région et sur le terroir comme nulle part ailleurs.

(c) Vin de Vouvray

Ce sont les accidents géologiques, formés il y a près de 90 millions d’années, qui ont conféré au terroir de Vouvray toute sa diversité. Parfois qualifié de « micro-terroir », on y retrouve des sols calcaires, des terrains argileux avec une couche de calcaire (appelés « aubuis »), ainsi que des terrains où se côtoient l’argile et le silex (appelés « perruches »).

Le vignoble historique et multiséculaire de Vouvray, façonné par le savoir-faire des hommes au fil des siècles, a deux singularités régionales.

(c) Vin de Vouvray

L’une, est la désignation des cultures par « clos » ou « lieu-dit ». Le « lieu-dit » désigne une entité cadastrale, que l’on retrouve à de multiples exemplaires sur l’aire d’appellation Vouvray, reflet d’une identité géologique. Cependant, tous les lieux-dits ne sont pas des « clos » mais tous les clos de Vouvray sont des lieux-dits. Ils sont clos, c’est-à-dire ceints de murs de pierre où le feu du silex se marie à la tendresse du calcaire. Captant la chaleur solaire ils affirment haut et fort la réputation de l’endroit, de son vin. Ils signent l’identité et la richesse séculaire des vins de Vouvray.

L’autre, est le fait que les coteaux de l’appellation Vouvray surplombent des caves troglodytes. Ces caves, creusées dans le tuffeau des coteaux, sont d’anciennes carrières de pierres de taille, extraites pour la construction des maisons, des églises et des murs des Clos. Elles procurent naturellement des conditions idéales de température et d’hydrométrie pour l’élevage et le vieillissement des vins issus des vignes qui les entourent.

(c) Château Bourillon

De fait, grâce à leur terroir caractéristique, les vins de Vouvray ont une belle capacité de vieillissement. Cinq à dix ans de garde leurs donnent une belle maturité. En effet, au fil du temps, la couleur devient plus ambrée, les notes de fruits exotiques, d’épices se développent, la richesse aromatique devient plus complexe et la texture devient encore plus soyeuse. Le vin s’arrondit mais son acidité naturelle maintient une bonne colonne vertébrale, il garde de la vigueur. Cette longévité s’explique par la qualité et la diversité du terroir, travaillé par les vignerons qui y exercent leur savoir-faire et confèrent aux vins de Vouvray une originalité et une personnalité incomparable.

Les vignerons de Vouvray, propriétaires depuis plusieurs générations ou nouveaux venus, écoutent la nature, respectent l’expression du terroir et recherchent avec acharnement le plus haut niveau de qualité. Leurs vins sont le fruit de leur travail et de leurs convictions.

Frédéric Bourillon, à la tête du Domaine Bourillon Dorléans, s’attache à perpétuer l’esprit traditionnel et la qualité de ses vins de Vouvray. Il doit sa passion et son savoir-faire à son grand-père, Gaston Dorléans, qui a fondé le domaine en 1921. Les vignes du domaine couvrent 26.5 hectares, sur les coteaux de la commune de Rochecorbon à l’appellation Vouvray et proviennent d’un seul cépage.

(c) Château Bourillon

Cette culture de la vigne respectueuse de la nature, garantit des produits d’une qualité optimale et régulière. La culture en lutte raisonnée et l’enherbement des vignes, l’utilisation des sarments broyés à la place des engrais chimiques et la réduction des rendements, optimisent la richesse aromatique des vins. De renommée internationale, les vins secs et moelleux du Domaine Bourillon Dorléans ont aussi la particularité de vieillir à température idéale dans les caves troglodytes du 15ème siècle. Chaque jour, Frédéric Bourillon puise sa philosophie et son amour du vin dans les millésimes vinifiés par le fondateur du domaine, afin que la tradition et la passion du beau produit se transmette encore longtemps…

Visuels : © Château Bourillon ; Vin de Vouvray.

Alban Cacaret : « Au Domaine Peyrassol, on travaille sur l’image haut de gamme du rosé.»

La commanderie de Peyrassol, nichée sur les contreforts du massif des Maures est l’un des domaines les plus importants de la région varoise. Plus de 80 hectares de vignes courent sur les collines et chaque cépage cultivé a été soigneusement sélectionné pour être en parfaite harmonie avec le climat. Alban Cacaret, à la tête du domaine, évoque l’origine de Peyrassol, ses tables d’hôtes et son désir de partager l’histoire et le savoir-faire de son domaine…

Quelle est l’histoire du Domaine Peyrassol ?

Alban Cacaret : Peyrassol était une ancienne Commanderie Templière du VIIIème siècle et déjà un domaine viticole. Les Templiers étant exterminés par le roi, le domaine est tombé entre les mains de l’Ordre de Malte. A la Révolution Française, comme Peyrassol était considéré comme un bien d’église, la famille provençale Rigord l’a repris. Puis nous avons acquis ce domaine en 2001. C’était une grande nouveauté familiale car nous n’étions pas de la région, ni du milieu de la vigne. C’était une volonté de mon oncle. Il s’était toujours dit que si ses affaires marchaient, il voulait retourner à la vigne, à la terre. Pourquoi la Provence ? C’était vraiment un concours de circonstances. Mon oncle cherchait depuis quelques années dans les vignobles français, il est arrivé un jour par hasard et a eu un grand coup de cœur pour Peyrassol. C’est un lieu à part, un peu hors du temps par son côté austère, puisque c’est perdu dans les collines avec beaucoup de pierres sèches de Provence, dans un cirque. De plus, c’est un lieu chargé d’histoire qui n’a jamais laissé personne indifférent.

(c) Peyrassol

Vos tables d’hôtes, « Un Jour à Peyrassol », sont-elles des moyens de faire découvrir votre domaine et vos produits ?

AC : Au début on s’est consacrés à réhabiliter le domaine : les bâtiments d’habitation, la cave, l’intégralité du domaine. Très vite, on a voulu partager le domaine et les vins. On a eu l’idée d’ouvrir une vitrine, « Un Jour à Peyrassol », à Paris, à Saint-Tropez et à Bruxelles, avec un bar à vins, où il était possible de faire des dégustations, et un restaurant où il est possible d’associer ces vins à la gastronomie. Au niveau de l’épicerie fine, on a souhaité axer sur la truffe : des truffes fraîches, des produits de la Maison de la Truffe, tout l’univers de la truffe. On a aussi certaines spécialités provençales et italiennes. Quels que soient les produits, ils sont tous haut de gamme. C’est un moyen de prolonger l’expérience Peyrassol !

(c) Peyrassol

Pourquoi assiste-on à une évolution du rosé, jadis un vin provençal bas de gamme ?

AC : C’est très simple. D’une part, les producteurs et les vignerons ont globalement amélioré la qualité. D’autre part, et c’est le principal, les clients l’apprécient énormément ! Il n’y a pas de succès sans les consommateurs, néophytes comme amateurs éclairés. Le rosé a aujourd’hui un véritable succès. Ce qui est extraordinaire, c’est que ce succès a démarré au moment où nous avons pris le domaine. On a été dans cette mouvance là, on a participé à ce succès, à notre niveau bien sûr. Nous avons été l’un des premiers domaines à mettre en bouteille dans des grands contenants, dans des magnums très élancés. Nous avons véritablement travaillé sur l’image haut de gamme du rosé. Notre cuvée Clos Peyrassol, que l’on produit à seulement à 6000 bouteilles, est une bouteille très élégante, et le vin est d’une fraîcheur et d’une subtilité troublantes.

(c) Peyrassol

Sur votre domaine, vous réservez une grande place à l’art. L’œnologie, la dégustation et les arts sont-ils donc intimement liés ?

AC : C’est très certainement lié. Tous ces éléments se sont mis en place très naturellement sur Peyrassol. C’était un lieu à faire connaître, à partager. Le partager signifie donc faire déguster les vins, proposer à nos visiteurs de rester plus longtemps grâce à la table d’hôtes sur le domaine, et de présenter des œuvres d’artistes, pièces de la collection privée de mon oncle. Nous avons vraiment voulu travailler sur cette notion de partage, ouvrir au public un lieu qui a traversé les temps et qu’aucun propriétaire ne pourrait vraiment s’approprier.

Visuels : © La Commanderie de Peyrassol

Valérie Rousselle : «Les rosés Crus Classés sont l’élite des vins de Provence. »

Ça y’est, la belle saison prend doucement ses quartiers d’été ! Fruits et légumes gorgés de soleil, terrasses doucement caressées par les rayons déclinants d’une chaude journée, la période estivale est le moment idéal pour découvrir de nouvelles saveurs et dégourdir ses papilles, en particulier à l’apéritif. Valérie Rousselle, à la tête du Château Roubine, domaine Cru Classé, produit une boisson rarement dissociée de l’été : le rosé. Entretien ensoleillé avec la propriétaire, qui nous parle du rosé, de ses subtilités de couleur et de goût, et des associations aussi surprenantes qu’elles sont délicieuses entre mets et rosé…

Présentez-nous le domaine et le Château Roubine en quelques mots.

Valérie Rousselle : Château Roubine est un domaine Cru Classé depuis 1955. C’est une propriété qui est l’un des fleurons de l’appellation Côtes de Provence. Il a appartenu à l’histoire, puisqu’il est traversé par la voie romaine dite « Julienne », puis il a appartenu à l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem. C’est un domaine qui a une histoire très forte et marquée, ce qui est la force des grandes propriétés provençales. J’ai initialement une formation dans l’hôtellerie, j’ai fait l’école hôtelière de Lausanne, puis après avoir travaillé pour le Groupe Barrière, j’avais l’intention et l’envie de revenir vers ma région d’origine – je suis native de Saint Tropez et varoise de cœur. En voyant Château Roubine en 1994, je suis vraiment tombée en amour pour ce domaine qui est magnifique. C’est un domaine d’un seul tenant, entouré de pins et de chênes, un écrin de vignes situé dans ce joli arrière-pays varois, entre Lorgues et Draguignan. Château Roubine c’est également 130 hectares de propriété et 92 hectares de vignes pour une production de 800 000 bouteilles.

(c) Château Roubine

Un petit éclaircissement pour les néophytes : d’où vient la couleur rose du rosé ?

VR : Le rosé n’est pas coupé. Le rosé est véritablement une couleur de vin tout à fait identifiée et il faut énormément de technique pour le réussir. On a tendance à croire que pour faire du rosé c’est assez facile ; le réussir est extrêmement difficile. Le rosé nécessite une grande maîtrise des températures. Le rosé est un vin qui est fait à partir de baies noires, qu’ils proviennent des cépages Syrah, Cabernet Sauvignon, Grenache, Tibouren ou Cinsault. Quand vous ouvrez un grain de raisin noir et que vous pelez la peau, vous voyez que la chair est blanche ou pâle à l’intérieur. La richesse d’un rosé, sa complexité, est obtenue par ce contact pelliculaire. Nous récoltons les baies à très basse température, de nuit, afin d’être obligatoirement en dessous de 17°C – nous avons par ailleurs été les précurseurs de la vendange nocturne. Plus c’est frais, meilleur est le rosé. A ce moment-là, nous allons fouler et écraser les baies et laisser en contact l’eau, les jus et le raisin. C’est cette macération pelliculaire qui va donner de la complexité au vin. Il faut noter que les pigments qui sont contenus dans la peau rouge se diffusent par l’action de la chaleur. C’est pour cela que vendanger la nuit permet d’avoir la complexité du goût sans avoir la couleur.

La couleur a-t-elle une importance pour le goût ?

VR : Absolument. On peut avoir une couleur pâle tout en ayant de la complexité. Travailler le vin à basse température lui permet d’avoir de la complexité. Il est vrai que dès lors qu’un rosé sera un peu plus soutenu en couleur, il sera plus fort en goût puisque la macération pelliculaire va être plus intense. Le rosé plus foncé sera peut-être moins léger, moins complexe, moins délicat, légèrement plus grossier. Ensuite, cela dépend des goûts. Les personnes qui préfèrent des rosés plus soutenus en bouche, ceux qui ont plus de corps, vont également préférer des rosés plus soutenus en couleur. Tout dépend aussi des marchés. Les marchés nordiques, par exemple, préfèrent des rosés aux couleurs plus soutenues. Ce rosé pâle est une tendance très Côte d’Azur, très Paris, très mode. C’est tendance. Les autres appellations productrices de rosé cherchent à copier la Provence, car celle-ci reste un modèle en matière de rosé. C’est en Provence que le premier rosé est né, nous en sommes vraiment les précurseurs, les Pères et les Mères du rose. C’est d’ailleurs la Provence qui a lancé la tendance et nous en sommes très fiers.

(c) Château Roubine

Le vin rosé est souvent associé à du vin bas de gamme. Le rosé a pourtant une appellation de Cru Classé ?

VR : J’ai la chance d’avoir été présidente, de 2005 à 2008, des Crus Classés. Nous étions 23 en 1955, nous ne sommes plus que 18 aujourd’hui. Nous représentons vraiment les locomotives de l’appellation. Les domaines Crus Classés ont été les pionniers en matière de progrès en vinification. Il n’y avait pas que des Crus Classés, mais ceux qui l’étaient faisaient partie de ces pionniers. Aujourd’hui ce sont les leaders de l’appellation qui restent Crus Classés, même si certains ne le revendiquent pas forcément. Les domaines de Crus Classés sont vraiment l’élite des vins de Provence.

En quoi le rosé est-il un vin associé à l’été ?

VR : Je pense qu’il l’est de moins en moins. On s’aperçoit qu’il est plutôt devenu une boisson à la mode. La grande tendance à présent se trouve dans les boîtes de nuit à Paris : les jeunes se mettent au rosé. Je trouve cela bien, car ça évite évidemment de s’orienter vers des spiritueux dont l’alcoolisation est plus forte et dont la consommation est bien plus dangereuse. La tendance, la mode maintenant, c’est de commander du rosé en boîte de nuit ou de prendre l’apéritif au rosé. Ça permet tout de même, d’un point de vue éducatif aussi, d’amener tout doucement les jeunes générations à comprendre le vin de manière simplifiée. Le rosé décomplexe un petit peu. On a moins besoin d’être expert pour apprécier un rosé. Dans l’esprit, ça ne veut pas dire que ce n’est pas compliqué ; cela décomplexe les gens qui veulent aborder l’œnologie. En démarrant par le rosé, cela semble plus facile. De même pour les dames : elles ont tendance à aimer le rosé car c’est à la fois le symbole d’une boisson de convivialité, de simplicité, d’amitié, de partage tout en ayant un champ très large d’alliances.

(c) Château Roubine

Justement, quelles sont, pour vous, les meilleures associations mets et vin rosé ?

VR : Le rosé est un vin qui peut s’associer à toutes sortes de cuisines, y compris les cuisines du monde, ce qui est également la tendance aussi un peu partout. Cela peut vraiment être très varié. Il y a des rosés qui seront des rosés « de plage », d’apéritif, que l’on peut apprécier à l’image du rosé piscine. Ils sont des rosés beaucoup plus légers, qui ont moins de complexité. Vous avez aussi des rosés de grande gastronomie, qui peuvent s’associer avec de la truffe, comme le fait mon voisin Bruno à Lorgues, qui sert mon rosé Tibouren Cuvée Inspire avec des truffes. Cela peut paraître surprenant mais ça tient très bien. Ce même rosé peut vraiment être servi sur de la belle gastronomie. On peut aussi imaginer un rosé Terre de Croix avec un très beau homard au poivre rose, ou avec un magret de canard et une sauce au miel, ou sur un cabri miellé. Avec le Terre de Croix on peut même aller sur du roquefort. Cela peut paraître troublant d’imaginer un rosé sur un fromage mais ça marche très bien ! Le Château Roubine, la cuvée traditionnelle, comme vin de plage peut être apprécié sur des tapas, sur des nems à l’apéritif, sur de la tapenade, sur des choses conviviales d’apéritif. On peut vraiment imaginer plein de choses et faire toutes sortes d’alliances avec le rosé.

Quel est votre dernier coup de cœur vinicole ?

VR : J’ai un coup de cœur, qui est un grand classique et également un clin d’œil, car j’ai eu la chance de goûter un Pichon Longueville de 1990, qui m’a fait penser à mon fils aîné Adrien qui aura bientôt 23 ans ! Cette dégustation s’est faite en très bonne compagnie, avec le meilleur sommelier du monde. J’ai un autre coup de cœur aussi pour un domaine qui m’est très cher, le domaine Ampelidae en Val de Loire. J’apprécie beaucoup son Sauvignon Bio, notamment le Millésime 2009 qui est vraiment d’une grande subtilité. En coup de cœur rosé, je vais prêcher pour ma paroisse, c’est la Cuvée Inspire Rosé, qui a été médaillé d’argent au Concours Général Agricole et que j’ai récemment eu l’occasion d’apprécier sur des truffes et sur des beignets de fleur de courgette. Ce qui était simplement délicieux ! Mais j’ai des coups de cœur très souvent !

(c) Château Roubine

Visuels : © Château Roubine

L’abus d’alcool est dangereux pour la santé. A consommer avec modération.

Le coup de cœur de la semaine : le Domaine des Terres Dorées

Pour conclure cette thématique Lyonnaise sous l’égide de Bacchus, direction le Domaine des Terres Dorées, dans le beaujolais. Depuis près de 30 ans, Jean-Paul Brun, à la tête du domaine, produit un vin selon des méthodes naturelles, afin que le terroir exprime ses multiples facettes. C’est notre coup de cœur de la semaine.

La viticulture en France et dans le Beaujolais a vu le jour lors de l’occupation romaine du sol français. En effet, c’étaient les légionnaires qui plantaient les pieds de vigne pour motiver et faire avancer les légions. Lyon détenait alors le monopole du commerce du vin, la plupart des échanges se faisant grâce aux voies fluviales. Dès 59 av. J.-C, la consommation de vin fleurit au bord des grandes routes qui traversent le territoire. Grâce à son terroir favorablement orienté, la proximité de la Saône et du Rhône navigables et l’accroissement des villes, le Beaujolais intensifie son activité viticole au XVIIe siècle.

(c) Daniel Gillet

Au lendemain des guerres de seigneuries de Beaujeu, les transactions viticoles, les sociétés d’agriculture, les écoles, les solutions mécaniques et chimiques, l’arrivée du chemin de fer puis de la route incarnent le dense cheminement historique du vignoble beaujolais. Dès les années 1600, la vigne, qui pousse au milieu des prés de pâture, attire la bourgeoisie lyonnaise. Jouissant d’un droit de vente sans taxe, les notables se valorisent auprès de Paris avec ce vin «clairet » de « bons pays ». Les classements commencent à voir le jour au moment de la révolution.

Les premières Appellations d’Origine Contrôlée (AOC) sont concrétisées en 1936 et ne concernent alors que Chiroubles, Fleurie, Chénas, Morgon et Moulin-à-vent. Attribuées par l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO), elles sont encouragées par les viticulteurs qui désirent asseoir une identité et une qualité contrôlée de leurs produits. La démarche AOC indexe au départ l’ensemble des conditions de fabrication : de la parcelle à la cave, de la vinification à l’embouteillage. Elle a ensuite concerné, en septembre 1937, l’appellation régionale Beaujolais, répartie sur les cantons de Villefranche, Anse et du Bois d’Oingt, et sur plusieurs villages des cantons de l’Arbresle et Tarare. Le même jour étaient signés les décrets officiels du Beaujolais blanc. Vinrent au final les appellations du Juliénas en mars 1938, du Brouilly et de La Côte de Brouilly en octobre 1938. Le Saint-Amour rejoint la grande famille des crus en février 1946, avant que Régnié n’obtienne la consécration en décembre 1988.

(c) Daniel Gillet

Sur 55 Km du sud au nord, le vignoble beaujolais est enserré entre Lyon et Mâcon, appuyé à l’ouest par le Massif central et à l’est, par la plaine de la Saône. Ce vignoble de coteaux forme un tapis serré dont les teintes varient au gré des saisons, des températures, de l’ensoleillement et de la luminosité. Orientés globalement du nord-est au sud-ouest, les rangs de vigne couvrent les monts du Beaujolais à une altitude moyenne de 300 m, sous des sommets qui culminent à 1 000 m. Influencée par cette topographie où l’eau abonde, la viticulture du beaujolais répond surtout de caractéristiques géologiques singulières : des terrains argilo-calcaires et gréseux peu profonds au sud, des sols cristallins légers et acides sur les hauteurs, et granitiques au nord.

(c) Daniel Gillet

La particularité du Beaujolais réside dans son cépage unique, à l’origine de la création de 12 appellations : le Gamay noir à jus blanc. Présent en Beaujolais depuis le début du XVIIe, ce cépage a su accompagner les évolutions du vignoble et des traditions culturales collectives Aujourd’hui, près de 70% des 36 000 hectares plantés en Gamay noir à jus blanc à travers le monde appartiennent au vignoble beaujolais.

Dans le beaujolais, il faut distinguer plusieurs appellations: les Beaujolais et Beaujolais villages, déclinés pour grande partie en vin primeur à travers le Beaujolais nouveau et le Beaujolais-villages nouveau, et les dix crus indexés au terroir – Chiroubles, Fleurie, Saint-Amour, Brouilly, Côte de Brouilly, Juliénas, Régnié, Chénas, Morgon et Moulin-à-Vent.

(c) DR

Souvent réduits aux seuls « beaujolais nouveaux » (dont les arômes rappelleraient ceux de la banane…), les vins du beaujolais sont qualitatifs, goûteux, se savourent et accompagnent divinement les plaisirs de la table. Les Beaujolais nouveaux et Beaujolais-Villages nouveaux s’apprécient à 12°C, une température où la tenue en bouche est optimale, et s’accordent avec une grande variété de plats : charcuteries, fruits de mer, pommes de terre gratinées avec des oignons ou encore tartare de poisson.

Les Beaujolais et Beaujolais-Villages se dégustent, après les primeurs, à 13/14°C, un seuil qui exalte opportunément la richesse aromatique du cépage Gamay. Leurs compléments gastronomiques idéaux sont issus des traditionnels bouchons lyonnais (tripes, boudins, andouillettes, cervelas…) ou des spécialités régionales (poulet de Bresse, escargots de Bourgogne, fromages de chèvre…). Beaujolais et Beaujolais-villages sont également parfaits lors de la saison estivale pour accompagner barbecues, terrines de poisson ou de légumes, fromages de chèvre frais et salades de fruits rouges.

Les crus du Beaujolais approuvent une moyenne de 16°C qui peut être légèrement abaissée, vers 15°C, pour un cru d’une ou deux années, ou inversement légèrement rehaussée pour un vin de trois à cinq ans (17°C est tout à fait recommandé). Plus corsés et charpentés, les dix crus du Beaujolais s’accordent quant à eux merveilleusement avec les grillades de bœuf, le pot-au-feu, le foie de veau (avec sauce au Beaujolais !) mais également la volaille ou l’agneau de lait. Longs en bouche, ils s’associent également aux terrines et poissons de rivière et ne déparent nullement avec un plat de quenelles ou un coq au vin. Ils sont également irrésistibles avec des desserts, tels que le crumble aux fruits rouges, le sorbet ou encore les figues au vin ou la tarte aux noix.

(c) RDV Communication

Cependant, les vins du Beaujolais ne seraient pas ce qu’ils sont sans l’âme attentionnée de leurs vignerons. Alors que la densité des vignes en Beaujolais est l’une des plus fortes du monde (de 13 000 à 7 000 pieds à l’hectare), les artistes du vin soignent leurs pieds au fil des saisons pour conduire leurs plants vers le meilleur. C’est le cas de Jean-Paul Brun, à la tête du Domaine des Terres Dorées, l’un des meilleurs vignerons de la région qui parvient à retranscrire dans ses cuvées les qualités des terroirs du Beaujolais.

Exploitation familiale, le Domaine des Terres Dorées est situé à Charnay-en-Beaujolais, à 5 kilomètres au sud-ouest de Villié-Morgon et couvre 44 hectares répartis sur plusieurs territoires. Vigneron consciencieux et passionné, Jean-Paul Brun travaille les cépages Gamay et Chardonnay avec le plus grand soin, toujours soucieux que son terroir exprime ses multiples facettes. «Le Gamay est un cépage fragile, très peu répandu au-delà du Beaujolais, hormis quelques régions,» explique-t-il, «C’est un cépage qui demande de petits rendements, des vignerons consciencieux et passionnés.» Le cep est ainsi accompagné du premier bourgeon jusqu’à la cueillette, avec un minimum d’intervention. «La vendange ne se fait qu’à pleine maturité,» continue-il, «Nos sols calcaires d’origine jurassique très proche des terroirs de la Côte d’Or nous ont orientés vers une vinification en méthode bourguignonne. Le Gamay donne là le meilleur de lui-même: un vin authentique.»

(c) DR

Les gestes et les pratiques de Jean-Paul Brun mettent en avant le respect de l’environnement, avec un vif intérêt pour les méthodes bio. Les sols sont labourés à la charrue et le cuivre ainsi que le soufre sont préférés aux produits chimiques pour préserver les vignes. Les vendanges sont manuelles et ne se font qu’à pleine maturité. Les raisins sont triés puis égrappés et mis en cuve. Dans la cave, le raisin fermente avec ses propres levures. La fermentation s’étale sur trois semaines à un mois, accompagnée de pigeage (ndlr. action de mélange du raisin dans la cuve pour une amélioration de sa macération). Cette longue macération est nécessaire pour communiquer aux vins les informations du terroir et ainsi, produire un vin fin, complexe, élégant et authentique. Jean-Paul Brun conclut : « Le Domaine des Terres Dorées, c’est une quinzaine de vins originaux et authentiques. Vinifiés dans la plus grande tradition bourguignonne, ils prouvent la diversité et la qualité de nos terroirs Beaujolais. »

Le Beaujolais n’a donc pas dit son dernier mot …

Source : Beaujolais.com
Visuels : © Beaujolais.com; RDV Communication.